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LE MAL D’ETRE DES « LOVERS » OU DES « LIKERS »

En bas de chaque tweet on vous propose des choix de réaction au message parfois appuyé par une image. Vous pouvez : (I) répondre à l’auteur du tweet (ii) retweeter, (iii) aimer, (iv) copier le lien, envoyer un message privé et ajouter le tweet aux signets.

En haut du tweet vous avez la possibilité de : (i)intégrer le tweet, (ii) se désabonner, (iii) masquer l’auteur (iv) bloquer, (v) signaler le tweet. C’est plusieurs possibilités qui sont offertes. Cependant, quelque chose manque dans cette panoplie de possibilités de réactions suggérées par Tweeter Inc. C’est la possibilité de dire non de ne pas être d’accord ou de désapprouver notamment une alternative de choix à love ou à like.

Nous sommes des êtres humains capables de pleurer c’est-à-dire pétris d’émotions qui nous distinguent de l’animal. Nous sommes des êtres humains, qui aiment et qui n’aiment pas. Comment peut-on nous réduire à des êtres humains qui ne sont capables que dire « j’aime »

Une vidéo montrant des cadavres refoulés par la mer aux larges, diffusée par Seydi Gassama est accompagnée par ce message « Une honte pour les dirigeants politiques africains, incapables de donner des opportunités, ou simple de l’espoir à leur jeunesse ».

Du 6 au 9 décembre 2019 ce tweet a enregistré 39,1 K de vues, 508 retweeter, et 719 mentions « j’aime » (au moment où j’écris ce texte).

L’activité de ce tweet est énorme mais ce qui est beaucoup plus frappant c’est le nombre de mention love ou like.  Sept cent dix-neuf personnes ont cliqué sur la mention « j’aime »

L’internaute Baba WOSS n’est pas d’accord avec la diffusion des images montrant les cadavres des jeunes à la berge a écrit pour réagir au tweet de Seydi Gassama. Il a écrit « Non-respect des cadavres, supprime frère c’est pas joli ».

A l’analyse, on se rend compte que Baba Woss est conditionné dans le choix du mode de sa réaction. Il n’a techniquement aucune autre possibilité pour exprimer sa désapprobation quant à la diffusion de ces images macabres que d’écrire. La mention « je n’aime pas » qui nous redonne notre liberté d’aimer ou de ne pas aimer n’est pas suggérée ni par Tweeter Inc ni par Facebook dans les possibles réactions.

En effet, ce n’est pas le conditionnement et la soumission à la technologie qui causent problème mais c’est le déni de Tweeter Inc et de Facebook que nous sommes des êtres humains qui aiment et/ou qui n’aiment pas. S’il est important pour les « marketteurs » de savoir ce que les gens aiment pour définir leurs stratégies de marketing, il est également aussi important de savoir ce que les gens n’aiment pas.

Tweeter Inc et Facebook nous font lover ou liker des choses que l’on désapprouve. Des choses que l’on n’aime pas. Des images d’accident, on love ou on like. Une femme battue et blessée par son mari, on love ou like, Des images de cadavres de jeunes refoulés par la mer à la berge des cotes mauritaniens, on love ou on like. Nous sommes tous devenus des « lovers » ou des « likers » toutefois nous restons des êtres humains capables d’aimer et ne pas aimer.

En conséquence, Tweeter Inc et Facebook doivent intégrer cette dimension de liberté de choix d’aimer ou de ne pas aimer les choses dans les possibilités de réactions suggérées.

Au risque d’être réduit pour toujours à des êtres automates sans volonté, sans conscience, sans liberté de dire « j’aime » ou « je n’aime pas » Tweeter Inc et Facebook doivent naturellement nous donner un choix alternatif à love et à like. Si non, bon ou mauvais, que l’on soit d’accord ou pas, que l’on approuve ou que l’on désapprouve, on est condamné à cliquer comme des automates love ou like.  Et pourtant on n’est pas des automates.

Par Baba Gallé Diallo

Email : babadediana@gmail.com

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